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LOS CARACTERES O LAS COSTUMBRES DE ESTE SIGLO (EXTRACTOS)
Traducción de Ramón Andrés
[1:1] Tout est dit, et l'on vient trop tard depuis plus de sept mille ans qu'il y a des hommes, et qui pensent. Sur ce qui concerne les mours, le plus beau et le meilleur est enlevé ; l'on ne fait que glaner après les anciens et les habiles d'entre les modernes.

[2:9] Il n'est pas si aisé de se faire un nom par un ouvrage parfait, que d'en faire valoir un médiocre par le nom qu'on s'est déjà acquis.

[3:53] Les femmes sont extrêmes ; elles sont meilleures ou pires que les hommes.

[2:22] Il apparaît de temps en temps sur la surface de la terre des hommes rares, exquis, qui brillent par leur vertu, et dont les qualités éminentes jettent un éclat prodigieux. Semblables à ces étoiles extraordinaires dont on ignore les causes, et dont on sait encore moins ce qu'elles deviennent après avoir disparu, ils n'ont ni aïeuls, ni descendants ; ils composent seuls toute leur race.

[2:25] Un homme libre, et qui n'a point de femme, s'il a quelque esprit, peut s'élever au-dessus de sa fortune, se mêler dans le monde, et aller de pair avec les plus honnêtes gens : cela est moins facile à celui qui est engagé ; il semble que le mariage met tout le monde dans son ordre.

[3:80] Ne pourrait-on point découvrir l'art de se faire aimer de sa femme ?

[4:11] L'on n'aime bien qu'une seule fois ; c'est la première : les amours qui suivent sont moins involontaires.

[4:39] L'on veut faire tout le bonheur, ou si cela ne se peut ainsi, tout le malheur de ce qu'on aime.

[4:40] Regretter ce que l'on aime est un bien, en comparaison de vivre avec ce que l'on hait.

[4:52] On convie, on invite, on offre sa maison, sa table, son bien et ses services : rien ne coûte qu'à tenir parole.

[4:63] Il faut rire avant que d'être heureux, de peur de mourir sans avoir ri.

[4:64] La vie est courte, si elle ne mérite ce nom que lorsqu'elle est agréable ; puisque si l'on cousait ensemble toutes les heures que l'on passe avec ce qui plaît, l'on ferait à peine d'un grand nombre d'années une vie de quelques mois.

[4:65] Qu'il est difficile d'être content de quelqu'un !

[4:75] Le cas n'arrive guère où l'on puisse dire, j'étais ambitieux ; ou on ne l'est point, ou on l'est toujours : mais le temps vient où l'on avoue que l'on a aimé.

[4:76] Les hommes commencent par l'amour, finissent par l'ambition, et ne se trouvent souvent dans une assiette plus tranquille que lorsqu'ils meurent.

[5:37] Ne pouvoir supporter tous les mauvais caractères dont le monde est plein, n'est pas un fort bon caractère : il faut dans le commerce des pièces d'or, et de la monnaie.

[6:6] Deux marchands étaient voisins et faisaient le même commerce, qui ont eu dans la suite une fortune toute différente : ils avaient chacun une fille unique, elles ont été nourries ensemble, et ont vécu dans cette familiarité que donnent un même âge et une même conditions : l'une des deux pour se tirer d'une extrême misère cherche à se placer, elle entre au service d'une fort grande Dame et l'une des premières de la Cour ; chez sa compagne.

[6:10] Un projet assez vain serait de vouloir tourner un homme fort sot et fort riche en ridicule ; les rieurs sont de son côté.

[6:18] Champagne au sortir d'un long dîner qui lui enfle l'estomac, et dans les douces fumées d'un vin d'Aveney ou de Sillery, signe un ordre qu'on lui présente, qui ôterait le pain à toute une Province si l'on n'y remédait ; il est excusable, quel moyen de comprendre dans la première heure de la digestion qu'on puisse quelque part mourir de faim ?

[6:40] Il faut avoir trente ans pour songer à sa fortune, elle n'est pas faite à cinquante ; l'on bâtit dans sa vieillesse, et l'on meurt quand on en est aux peintres et aux vitriers.

[6:52] Il n'y a au monde que deux manières de s'élever, ou par sa propre industrie, ou par l'imbécilité des autres.

[6:53] Les traits découvrent la complexion et les mours ; mais la mine désigne les biens de fortune ; le plus ou le moins de mille livres de rente se trouve écrit sur les visages.

[6:65] L'avare dépense plus mort en un seul jour, qu'il ne faisait vivant en dix années ; et son héritier plus en dix mois, qu'il n'a su faire lui-même en toute sa vie.

[6:67] Les enfants seraient peut-être plus chers à leurs pères ; et réciproquement les pères à leurs enfants, sans le titre d'héritiers.

[8:10] La Cour est comme un édifice bâti de marbre, je veux dire qu'elle est composée d'hommes fort durs, mais fort polis.

[8:36] L'on dit à la Cour du bien de quelqu'un pour deux raisons, la première afin qu'il apprenne que nous disons du bien de lui ; la seconde afin qu'il en dise de nous.

[8:37] Il est aussi dangereux à la Cour de faire les avances, qu'il est embarrassant de ne point les faire.

[8:65] Les roues, les ressorts, les mouvements sont cachés, rien ne paraît d'une montre que son aiguille, qui insensiblement s'avance et achève son tour ; image du Courtisan d'autant plus parfaite, qu'après avoir fait assez de chemin, il revient souvent au même point d'où il est parti.

[8:70] L'esclave n'a qu'un maître : l'ambitieux en a autant qu'il y a de gens utiles à sa fortune.

[8:95] L'on contemple dans les Cours de certaines gens, et l'on voit bien à leurs discours et à toute leur conduite, qu'ils ne songent ni à leurs grands-pères, ni à leurs petits-fils : le présent est pour eux ; ils n'en jouissent pas, ils en abusent.

[9:3] L'avantage des Grands sur les autres hommes est immense par un endroit ; je leur cède leur bonne chère, leur riches ameublements, leurs chiens, leurs chevaux, leurs singes, leurs nains, leurs fous et leurs flatteurs ; mais je leur envie le bonheur d'avoir à leur service des gens qui les égalent par le cour et par l'esprit, et qui les passent parfois.

[9:56] L'on doit se taire sur les Puissants ; il y a presque toujours de la flatterie à en dire du bien ; il y a du péril à en dire du mal pendant qu'il vivent, et de la lâcheté quand ils sont morts.

[10:25] Les huit ou dix mille hommes sont au Souverain comme une monnaie dont il achète une place ou une victoire ; s'il fait qu'il lui coûte moins, s'il épargne les hommes, il ressemble à celui qui marchande et qui connaît mieux qu'un autre le prix de l'argent.

[11:1] Ne nous emportons point contre les hommes en voyant leur dureté, leur ingratitude, leur injustice, leur fierté, l'amour d'eux-mêmes, et l'oubli des autres ; ils sont ainsi faits, c'est leur nature, c'est ne pouvoir supporter que la pierre tombe, ou que le feu s'élève.

[11:34] Il n'y a rien que les hommes aiment mieux à conserver, et qu'ils ménagent moins que leur propre vie.

[11:36] La mort n'arrive qu'une fois, et se fait sentir à tous les moments de la vie ; il est plus dur d'appréhender que de la souffrir.

[11:38] Ce qu'il y a de certain dans la mort, est un peu adouci par ce qui est incertain ; c'est un indéfini dans le temps qui tient quelque chose de l'infini, et que l'on appelle éternité.

[11:39] Pensons que comme nous soupirons présentement pour la florissante jeunesse qui n'est plus, et ne reviendra point, la caducité suivra qui nous fera regretter l'âge viril où nous sommes encore, et que nous n'estimons pas assez.

[11:40] L'on craint la vieillesse, que l'on n'est pas sûr de pouvoir atteindre.

[11:41] L'on espère de vieillir et l'on craint la vieillesse, c'est-à-dire, l'on aime la vie et l'on fuit la mort.

[11:43] Si de tous les hommes les uns mouraient, les autres non, ce serait une désolante affliction que de mourir.

[11:46] Le regret qu'ont les hommes du mauvais emploi du temps qu'ils ont déjà vécu, ne les conduit pas toujours à faire de celui qui leur reste à vivre, un meilleur usage.

[11:48] Il n'y a pour l'homme que trois événements, naître, vivre et mourir : il ne se sent pas naître, il souffre à mourir, et il oublie de vivre.

[11:56] Aux enfants tout paraît grand, les cours, les jardins, les édifices, les meubles, les hommes, les animaux ; aux hommes les choses du monde paraissent ainsi, et j'ose dire par la même raison, parce qu'ils sont petits.

[11:82] Il y a une espèce de honte d'être heureux à la vue de certaine misères.

[11:91] Quelle mésintelligence entre l'esprit et le cour ! Le Philosophe vit mal avec tous ses préceptes ; et le politique rempli de vues et de réflexions ne sait pas se gouverner.

[11:102] La plupart des hommes emploient la meilleure partie de leur vie à rendre l'autre misérable.

[12:4] Deux choses toutes contraires nous préviennent également, l'habitude et la nouveauté.

[12:31] La physionomie n'est pas une règle qui nous soit donnée pour juger les hommes : elle nous peut servir de conjecture.

[12:35] Ceux qui sans nous connaître assez, pensent mal de nous, ne nous font pas de tort ; ce n'est pas nous qu'ils attaquent, c'est le fantôme de leur imagination.

[3:58] Un homme est plus fidèle au secret d'autrui qu'au sien propre ; une femme au contraire garde mieux son secret que celui d'autrui.

[3:64] Un homme qui serait en peine de connaître s'il change, s'il commence à vieillir, peut consulter les yeux d'une jeune femme qu'il aborde, et le ton dont elle lui parle : il apprendra ce qu'il craint de savoir. Rude école.

[12:57] Après l'esprit de discernement, ce qu'il y a au monde de plus rare, ce sont les diamants et les perles.

[12:75] Je ne mets au-dessus d'un grand politique que celui qui néglige de le devenir, et qui se persuade de plus en plus que le monde ne mérite point qu'on s'en occupe.

[12:90] Le flatteur n'a pas assez bonne opinion de soi, ni des autres.

[12:108] Il n'y a point de chemin trop long à qui marche lentement et sans se presser ; il n'y a point d'avantages trop éloignés à qui s'y prépare par la patience.

[12:109] Ne faire sa cour à personne, ni attendre de quelqu'un qu'il vous fasse la sienne ; douce situation, âge d'or, état de l'homme le plus naturel.

[13:31] Chaque heure en soi, comme à notre égard est unique ; est-elle écoulée une fois, elle a péri entièrement, les millions de siècles ne la ramèneront pas : les jours, les mois, les années s'enfoncent, et se perdent sans retour dans l'abîme des temps ; le temps même sera détruit ; ce n'est qu'un point dans les espaces immenses de l'éternité, et il sera effacé : il y a de légères et frivoles circonstances du temps qui ne sont point stables, qui passent, et que j'apppelle des modes, la grandeur, la faveur, les richesses, la puissance, l'autorité, l'indépendance, le plaisir, les joies, la superfluité. Que deviendront ces modes, quand le temps même aura disparu ? La vertu seule si peu à la mode va au-delà des temps.

[14:9] Certains gens portent trois noms de peur d'en manquer ; ils en ont pour la campagne et pour la ville, pour les lieux de leur service ou de leur emploi : d'autres ont un seul nom dissyllabe qu'ils anoblissent par des particules, dès que leur fortune devient meilleure : celui-ci par la suppression d'une syllabe fait de son nom obscur, un nom illustre : celui-là par le changement d'une lettre en une autre se travestit, et de Syrus devient Cyrus : plusieurs suppriment leurs noms qu'ils pourraient conserver sans honte, pour en adopter de plus beaux, où ils n'ont qu'à perdre par la comparaison que l'on fait toujours d'eux qui les portent, avec les grands hommes qui les ont portés : il s'en trouve enfin qui nés à l'ombre des clochers de Paris veulent être Flamands ou Italiens, comme si la roture n'était pas de tout pays, allongent leurs noms Français d'une terminaison étrangère, et croient que venir de bon lieu c'est venir de loin.

[14:11] À combien d'enfants serait utile la loi qui déciderait que c'est le ventre qui anoblit ? mais à combien d'autres serait-elle contraire !

[14:51] La question est une invention merveilleuse et tout à fait sûre, pour perdre un innocent qui a la complexion faible, et sauver un coupable qui est né robuste.

[16:10] J'exigerais de ceux qui vont contre le train commun et les grandes règles, qu'ils sussent plus que les autres, qu'ils eussent des raisons claires, et de ces arguments qui emportent conviction.

[16:32] Qui a vécu un seul jour, a vécu un siècle, même soleil, même terre, même monde, mêmes sensations, rien ne ressemble mieux à aujourd'hui que demain : il y aurait quelque curiosité à mourir, c'est-à-dire à n'être plus un corps, mais à être seulement esprit. L'homme cependant impatient de la nouveauté n'est point curieux sur ce seul article ; né inquiet et qui s'ennuie de tout, il ne s'ennuie point de vivre, il consentirait peut-être à vivre toujours : ce qu'il voit de la mort le frappe plus violemment que ce qu'il en sait, la maladie, la douleur, le cadavre le dégoûtent de la connaissance d'un autre monde : il faut tout le sérieux de la Religion pour le réduire.

[16:39] Si tout est matière, et si la pensée en moi comme dans tous les autres hommes n'est qu'un effet de l'arrangement des parties de la matière ; qui a mis dans le monde toute autre idée que celle des choses matérielles ? la matière a-t-elle dans son fond une idée aussi pure, aussi simple, aussi immatérielle qu'est celle de l'esprit ? comment peut-elle être le principe de ce qui la nie et l'exclut de son propre être ? comment est-elle dans l'homme ce qui pense, c'est-à-dire, ce qui est à l'homme même une conviction qu'il n'est point matière ?

[16:50] Si on ne goûte point ces Caractères, je m'en étonne ; et si on les goûte, je m'en étonne de même.
[1:1] Todo se ha dicho, y llegamos demasiado tarde cuando hace más de siete mil años que hay hombres, y que piensan. En lo que concierne a las costumbres, lo mejor y más bello se ha esfumado con los libros de antaño. No queda más que espigar entre los antiguos y los más diestros de los modernos.

[2:9] No existe tarea más deplorable en el mundo que labrarse la gloria de un nombre; al cabo, todo termina cuando la obra apenas se ha esbozado.

[3:53] Las mujeres están en los extremos: o bien son mejores que los hombres, o bien son peores.

[2:22] De tiempo en tiempo aparecen en la superficie de la Tierra hombres excepcionales, exquisitos, que brillan por su virtud, y cuyas eminentes cualidades irradian un prodigioso resplandor. Al igual que aquellas extraordinarias estrellas, de las que ignoramos la causa y más todavía su extinción, no tienen antepasados ni descendientes: forman por sí solos un linaje.

[2:25] Un hombre libre, sin compañía de mujer, si cuenta con algo de talento, puede gozar de fortuna, darse a admirar al mundo y codearse con la gente de más lustre. Pero no es fácil conseguir tales provechos para el que está casado. Se diría que el matrimonio pone a cada uno en su lugar.

[3:80] ¿No se podría descubrir el arte de hacerse amar por la mujer propia?

[4:11] No amamos por entero más que una sola vez, la primera: los amores que acontecerán después son menos involuntarios.

[4:39] Queremos dar toda la felicidad a la que amamos, y, si no es posible, toda la amargura.

[4:40] Añorar al ser amado es un bien si lo comparamos con el hecho de vivir junto al que odiamos.

[4:52] Hospedamos, invitamos, ofrecemos la casa, la mesa, cuanto poseemos, pero lo único que no damos es la firmeza de nuestra palabra.
[4:63] Hay que reír antes de ser feliz, para no morir sin haber reído.

[4:64] La vida es breve si sólo le damos este nombre cuando es grata, pues si sumásemos todas las horas transcurridas en el goce, apenas los largos años de una existencia se nos convertirían en unos pocos meses.

[4:65] ¡Cuán difícil es estar satisfecho de alguien!

[4:75] Qué pocas veces se llega a decir: «Yo era ambicioso». O no se es ambicioso, o se lo es siempre. En cambio, surge el momento en que se confiesa haber amado.

[4:76] Los hombres empiezan con el amor, lo truecan por la ambición, y sólo descansan cuando mueren.

[5:37] No poder soportar los caracteres malos, de los que el mundo rebosa, nada dice a favor del nuestro: es necesario que en el comercio corran tanto las monedas de oro como las de cobre.

[6:6] Dos mercaderes vecinos, y que vendían el mismo género, tuvieron desigual fortuna. Cada uno era padre de una hija única. Ambas se criaron juntas, vivieron en esa familiaridad que dan la misma edad e igual condición. Pasado el tiempo, una de ellas, tratando de huir de la miseria, busca situarse y entra al servicio de una dama de la corte, acaso de las más destacadas: era su antigua compañera.

[6:10] Vana empresa sería ridiculizar a un hombre muy torpe pero rico; los que debieran reírse estarían de su parte.

[6:18] Champagne, al salir de un opíparo banquete que le ha llenado la panza, con los dulces vapores de un vino de Avernay o de Sillery, firma una orden que le presentan al vuelo, según la cual, a no ser reparada, dejaría sin pan a una provincia entera. Tiene su disculpa, pues, ¿cómo iba a comprender, en plena digestión, que alguien pueda morir de hambre?

[6:40] A los treinta años se piensa en hacer fortuna, y a los cincuenta no está hecha. Uno edifica en la vejez, y muere cuando empiezan su labor los pintores y cristaleros.

[6:52] En el mundo no hay más que dos maneras de ascender: o por la propia industria, o por la imbecilidad ajena.

[6:53] Los modos revelan el temperamento y las costumbres, pero el rostro señala los bienes de fortuna. La renta más o menos generosa se marca en las facciones.

[6:65] El avaro gasta el día de su muerte más que en diez años de existencia, y su heredero en diez meses más de lo que él gastó a lo largo de su vida.

[6:67] Tal vez los hijos serían más queridos por sus padres, y recíprocamente, los padres por sus hijos, sin la condición de herederos.

[8:10] La corte es como un edificio hecho de mármol; quiero decir, que está compuesta de hombres muy duros pero pulidos.

[8:36] Dos razones son las que llevan a hablar bien de alguien en la corte: la primera, para que se sepa que hablamos bien de él; la segunda, para que él hable bien de nosotros.

[8:37] En la corte es tan peligroso dar un paso como no darlo.

[8:65] Las ruedas, los resortes y los movimientos están ocultos; nada se muestra de un reloj más que su manecilla, que avanza insensiblemente y cumple su vuelta: imagen del cortesano, y tanto más perfecta cuanto que, después de haber andado largo camino, vuelve a menudo al punto de partida.

[8:70] El esclavo sólo tiene un amo; no así el ambicioso, que tiene tantos dueños como personas puedan procurarle el favor.

[8:95] Se encuentran en las cortes ciertas gentes que, a tenor de sus palabras y conducta, parecen no pensar ni en sus abuelos ni en sus nietos. Para ellos sólo cuenta el presente; y no lo gozan, sino que abusan de él.

[9:3] La ventaja de los grandes sobre el resto es inmensa en un aspecto. Les cedo la buena pitanza, los fastuosos muebles, sus perros y caballos, sus monos, sus enanos y aduladores, pero les envidio la dicha de tener a su servicio gentes que les igualan, y a veces exceden, en corazón e inteligencia.

[9:56] Deberíamos callar en lo tocante a los poderosos. Hablar bien de ellos casi siempre es adulación. En vida es peligroso pronunciarse en contra, y a su muerte es cobardía.

[10:25] Los ocho o diez mil hombres de una milicia son para el soberano como la moneda con que comprar una plaza o una victoria. Si logra que le cueste menos, si economiza hombres, se asemeja al negociante que conoce mejor que otro el valor del dinero.

[11:1] No nos enfurezcamos contra los hombres al ver su dureza, su ingratitud, su injusticia, su orgullo, el amor a sí mismos y el olvido para con los demás. Están hechos así, es su naturaleza. Es como no poder soportar que la piedra caiga o que el fuego ascienda.

[11:34] Nada hay que los hombres deseen conservar tanto y que le procuren un peor trato que la vida.

[11:36] La muerte sólo llega una vez, pero se la siente en todos los instantes de la vida. Más duro es temerla que sufrirla.

[11:38] Lo que hay de cierto en la muerte queda aminorado por su propia incertidumbre. Es un indefinido en el tiempo que tiene algo de lo infinito, de eso que llamamos eternidad.

[11:39] Pensemos que, del mismo modo que hoy suspiramos por la florida juventud perdida, y que no habrá de volver, al llegar la edad caduca añoraremos el tiempo viril en el que todavía nos hallamos y que no apreciamos lo bastante.

[11:40] Tememos una vejez que no estamos seguros de alcanzar.

[11:41] Esperamos envejecer y tememos la vejez, es decir, amamos la vida y huimos de la muerte.

[11:43] Si unos hombres murieran y otros no, el morir sería una desoladora aflicción.

[11:46] El pesar que causa a los hombres haber malbaratado el tiempo pasado, no les empuja siempre a administrar mejor el que les queda.

[11:48] Tres acontecimientos hay para el hombre: nacer, vivir y morir. Del primero no tiene memoria, sufre al morir, y olvida vivir.

[11:56] A los niños todo les parece grande: los patios, los jardines, los edificios, los muebles, los hombres y los animales. Lo mismo sucede a los mayores con las cosas del mundo, y me atrevo a decir que por la misma causa: porque son pequeños.

[11:82] A la vista de ciertas calamidades, sentimos un resabio de vergüenza al ser dichosos.

[11:91] ¡Qué desavenencia entre la mente y el corazón! Vive mal el filósofo en pugna con sus principios, y el político, saturado de interrogantes y reflexiones, no sabe gobernarse.

[11:102] La mayoría de los hombres emplean la mejor parte de su vida en hacer miserable la otra.

[12:4] Dos cosas contrarias nos persuaden por igual: la costumbre y la novedad.

[12:31] La fisonomía no es una regla que nos ha sido dada para juzgar a los hombres, pero puede servirnos de conjetura.

[12:35] Aquellos que sin apenas conocernos piensan mal de nosotros, no son causa de ofensa, puesto que no nos atacan: sólo se enfrentan al fantasma que ha forjado su fantasía.

[3:58] Un hombre es más fiel al secreto ajeno que al suyo propio; una mujer, por contra, guarda mejor su secreto que el del prójimo.

[3:64] Un hombre que empieza a intuir achaques y a temer los avisos de la vejez, acérquese a una muchacha, consulte sus ojos, escuche el tono con que le habla: desvelará lo que temía. ¡Dura escuela!

[12:57] Después del espíritu juicioso, lo más raro en el mundo son los diamantes y las perlas.

[12:75] Únicamente pongo por encima de un político al que no quiere serlo, y sobre todo si se halla en el convencimiento de que el mundo no merece su esfuerzo.

[12:90] El adulador no tiene buena opinión de sí ni de los demás.

[12:108] No hay camino demasiado largo para el que va a paso lento y sin presura; tampoco hay frutos lejanos para quien se instruye en la paciencia.

[12:109] No cortejar a nadie ni aguardar que nos cortejen. Dulce condición, edad de oro, el estado más natural del hombre.

[13:31] Cada hora en sí misma, y en lo que nos atañe, es única. Una vez huida, se pierde para siempre, y los millones de siglos que habrán de encadenarse no nos serán retornados. Los días, los meses y los años caen sin vuelta en el abismo de los tiempos, y hasta el propio tiempo terminará por desaparecer: no es más que un punto en los inmensos espacios de la eternidad, y será borrado. Acontecen en el tiempo, sin embargo, circuntancias huecas y frívolas, que no son estables, y a las que yo llamo modas, sépase grandeza, privanza, riquezas, poder, autoridad, independencia, placeres, alegrías, superfluidad. ¿Qué será de todo ello cuando el tiempo haya desaparecido? Sólo la virtud, tan poco de moda, excede al tiempo.

[14:9] Algunos llevan tres apellidos por miedo a tener pocos. Los tienen para el campo y la ciudad, para el lugar en que sirven o el empleo en que se hallan. Otros, que cuentan con un solo nombre disílabo, lo ennoblecen añadiendo partículas en cuanto prospera su fortuna. Los hay, sin embargo, que suprimen una sílaba y de su oscuro nombre surge uno ilustre; también está el que da en mudar una letra, y de Siro viene a llamarse Ciro. No son pocos los que suprimen sus apellidos, que podrían conservar sin deshonra, para acogerse a otros de más lustre, con lo cual sólo pueden perder por la comparación que se establece entre ellos y los hombres insignes que los llevaron. No faltan, en fin, los que nacidos a la sombra de los campanarios de París, quieren pasar por flamencos o italianos, como si en dichos países no hubiere villanía, y alargan sus apellidos franceses con terminaciones extranjeras, creyendo que venir de lejos es proceder de buen lugar.

[14:11] ¡A cuántos hijos les sería de provecho la ley que dictase que es el vientre el que ennoblece! ¡Y a cuántos resultaría un perjuicio!

[14:51] La tortura es un maravilloso invento para doblegar a un inocente enjuto y salvar a un culpable corpulento.

[16:10] Exigiría de aquellos que van contra la opinión común y las reglas generales, que mostrasen un saber superior a los demás y tuvieran razones claras y argumentos capaces de convencer.

[16:32] Quien ha vivido un solo día, ha vivido un siglo: el mismo sol, la misma tierra, el mismo mundo, idénticas sensaciones. Nada es más semejante al hoy que el mañana. Parece que el morir tendría que alentarnos cierta curiosidad, es decir, probar ese paso que habrá de llevarnos de ser un cuerpo a devenir en un espíritu. Sin embargo, el hombre, impaciente ante toda novedad, no siente anhelo al respecto. Inquieto desde la cuna y hastiado de toda cosa, no le aburre el vivir, y acaso accedería a ser eterno. La visión de la muerte le afecta más hondamente que todo lo que sabe acerca de ella: la enfermedad, el dolor, el cadáver le menoscaban el deseo de conocer otro mundo. Se requiere toda la pujanza de la religión para resignarlo.

[16:39] Si todo es materia, y si el pensamiento que hay en mí, como en el resto de los hombres, no es más que un efecto del orden de las partes de la materia, ¿quién añadió al mundo otra idea distinta relativa a las cosas materiales? ¿La materia guarda en su esencia una idea tan pura, tan simple e inmaterial como lo es la del espíritu? ¿Cómo puede ser el principio de aquello que la niega y excluye de su propio ser? ¿Cómo puede acontecer en el hombre lo que piensa, es decir, lo que el propio hombre concibe como no materia?

[16:50] Si no gustan estos Caracteres, me sorprende; si gustaren, también me sorprendería
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